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Marseille Provence 2013

GR 2013, la meilleure façon de marcher

Né de la conviction que Marseille est un laboratoire du dialogue ville-nature, ce projet de randonnée culturelle nous invite à arpenter un territoire méconnu. Quel territoire ? Notre métropole et ses environs. L'itinéraire de randonnée de 365 km - le plus vaste projet labellisé Marseille Provence 2013 - sera inauguré dans un mois. Décryptage et mode d’emploi avec son concepteur, l’éditeur Baptiste Lanaspeze.

­ Arpenter pour la première fois les coulisses d’une déchetterie industrielle aux couleurs de Far West, regarder autrement ces arbres qui prolifèrent aux abords des chantiers et des voies ferrées, tremper ses pieds dans un cours d’eau qui serpente sous l’autoroute… C’est possible et balisé pour nous par le GR 2013. Pour créer ce "musée à ciel ouvert" le concepteur du projet a réuni à la fois un groupe d’artistes marcheurs partis nez au vent et sac au dos, mais aussi la Fédération Française de Randonnée du département et ses 118 clubs. Lesquels sont en charge du balisage rouge et jaune du sentier. Marcher donc, mais marcher en périurbain, dans des zones a priori pas très attrayantes, là où la ville et la campagne se mélangent, se juxtaposent… Afin que tout promeneur regarde autrement ce territoire d’eau, de pierre, de terre et de verdure, passer par ces zones que l’on évite en général. C’est la particularité de ce pari fou, poétique et pragmatique tout à la fois. Car il a fallu concerter puis collaborer avec les 39 communes que traverse le sentier, tester la faisabilité de chaque parcours, qui doit être accessible à tous. "D’ailleurs nous préférons les mots de marche ou de promenade, au mot randonnée ; on n’est pas dans l’exploit physique. C’est de la culture avant d’être du sport", explique Baptiste Lanaspeze. Du culturel, pour cet immense sentier en forme de 8, de l’infini, qui va rejoindre ainsi le panthéon des 2700 km de sentier des Bouches-du-Rhône. Car "Nous voulons dépasser les clivages, en parlant de projet culturel, martèle B. Lanaspeze, en proposant un projet compréhensible à la fois par un critique d’art pointu et le grand public". Rendre accessible à tous, au sens propre comme au sens figuré l’appropriation de ce territoire méconnu par… les pieds.

Le parcours

Il a été imaginé par l’artiste marcheur Nicolas Mémain "montreur d’ours en béton" qui officie depuis quelque temps déjà, initiant les Marseillais aux mystères de la beauté des paysages de béton via des visites guidées  … Le parcours du GR dessine donc une boucle, s’enroulant autour des deux grands "vides" non bâtis de notre territoire : l’Etang de Berre et le massif de l’Etoile. L’idée clé ? "Ouvrir à la randonnée des espaces qui ne sont pas considérés comme intéressants, et même considérés comme laids", s’amuse B.Lanaspeze. Trois grandes zones commerciales sont ainsi traversées : Plan-de-Campagne, Grand Littoral et La Valentine. On retrouve dans cet itinéraire une voie ferrée oubliée comme sortie tout droit d’un décor de cinéma, des zones industrielles, de grands ensembles… En fait, ce que l’on appelle l’anthropisation, c’est-à-dire ce qui a été modifié par l’homme. "Ce qui nous intéresse c’est le croisement des deux patrimoines : le naturel avec la faune et la flore mais aussi ce paysage façonné par l’homme. Nous avons tous l’idée que ce qui a été transformé par l’homme est, a priori,  plutôt laid", argumente B.Lanaspeze.
Valoriser dans Marseille d’abord (70km de sentier) ce qui est particulier et omniprésent, c’est-à-dire l’imbrication du rural, les champs dans les quartiers Nord par exemple. "Il fallait trouver dans ces endroits-là des passages qui seraient intéressants… Si l'on part de ce postulat, au lieu de monter dans les montagnes, au sommet du Garlaban, on reste dans les vallées, on contourne !" précise le concepteur. Regarder autrement ce qui nous entoure, accepter de se laisser surprendre par ce que l’on pensait bien connaître, balader dans des zones en friche… redonner au terme "faire l’école buissonnière" son vrai sens.

Une tradition marseillaise

Nous oublions que la randonnée est une activité relativement récente, remontant au XIXe siècle et que Marseille et Berlin y ont joué un rôle prépondérant. Les deux cités sont deux laboratoires de l’invention de la randonnée pédestre. La trace historique phocéenne est  la Société des Excursionnistes Marseillais fondée en 1896. "Tous les Marseillais ont probablement un ancêtre familial ou un proche qui y a appartenu !" s’amuse Baptiste Lanaspeze. Autre élément  tangible : on dénombre 118 clubs de randonnée sur le département. C’est le premier de France dans ce domaine, grâce aux nombreux reliefs se prêtant à la randonnée.

Marseille Provence 2013 … et après ?

Le projet bénéficie d’une visibilité évidente en cette année d’inauguration mais il affiche la vocation d’être pérenne. "C’est formidable qu’il y ait des musées avec des œuvres dedans et que cela soit de la culture. Mais nous avons  envie de casser les murs : on considère que la création d’une infrastructure de transport pédestre, pérenne, qui va permettre aux gens de découvrir autrement le territoire où ils vivent pendant des décennies, c’est au moins aussi bien qu’une exposition", argumente B.Lanaspeze. Ne vous y trompez pas : cette oeuvre gigantesque est là pour tous nous inviter à modifier notre regard sur ce que nous côtoyons ou répugnons à découvrir : "Nous voulons promouvoir une idée de la culture qui soit populaire, compatible avec des pratiques sociales existantes. Peu importe que cette œuvre ne soit pas tamponnée,  art contemporain,  tant mieux même", s’enthousiasme le directeur du projet. L'inauguration officielle est prévue pour le 22 mars.

Que dire pour inciter les Marseillais à tenter l’expérience ? "Si vous descendez de votre voiture pour effectuer ces parcours, vous ne verrez  jamais plus ce territoire de la même façon. C’est une expérience sans retour", affirme Baptiste Lanaspeze. ­
(Crédits photos : Geoffroy Mathieu et Baptiste Lanaspeze)

Le GR en chiffres : 365 km de sentier 70km de sentier dans l’agglomération marseillaise 118 clubs de randonnée 39 communes traversées 11 artistes marcheurs participants Plus d’informations sur Marseille Provence 2013 Plus d'infos avec le Comité Départemental de Randonnée Pédestre des Bouches-du-Rhône Le topo guide : Une oeuvre littéraire et un guide pratique à la fois pour "orienter les pas et le regard". Conçu comme tous les autres guides de randonnée, il a quelques particularités : Quatre couleurs signalent les éléments intéressants. - gris clair : bâti et architecture du XXe siècle, lotissements, autoroutes,  grands ensembles - vert : biotope tout ce qui peut être l’objet d’un intérêt écologique - bleu : eau - rouge : histoire industrielle C’est le premier topo guide élaboré avec des artistes : il est émaillé de doubles pages réalisées par les artistes marcheurs proposant leur regard sur le territoire traversé. (dessins, photos...) Sortie le 15/03

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