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Métropôle Aix Marseille Provence
17 juillet 2013

AIX MARSEILLE PROVENCE - POR UNE ECO METROPOLE EURO-MEDITERRANENNE

Aix Marseille Provence : pour une éco-métropole euro-méditerranéenne

Par Sébastien Barles (conseiller municipal de Marseille, porte parole régional d'EELV) et Jean Canton (architecte-urbaniste, ancien directeur général de l'urbanisme de la ville de Marseille, militant pour le droit au logement pour tous).


 

 

La métropole Aix Marseille Provence devrait être une réalité dès 2014 à la suite du débat parlementaire en cours. L'expérience Marseille Provence 2013 Capitale européenne de la culture a permis de préfigurer la métropolisation par des projets de création d'un récit et d'un imaginaire commun et par une gouvernance partagée pour le portage du projet global. Le GR 2013 qui, allant d’Arles à La Ciotat et d'Aix à Marseille, forme un sentier de grande randonnée à vocation écologique et artistique qui donne à voir le paysage métropolitain transformé par l'homme et valorisé par les artistes marcheurs, est à cet effet emblématique.

Aussi, si le bassin de vie des habitants d'Aix-Marseille embrasse quasiment l'intégralité du département des Bouches-du-Rhône, ce territoire est terriblement morcelé et l'aire métropolitaine présente un double particularisme qui est que la ville-centre existe non pas comme source d'attractivité mais comme repoussoir (personne ne veut payer pour les pauvres – 25% des Marseillais vivent sous le seuil de pauvreté) et que ce territoire est multipolaire avec l'activité industrielle et portuaire autour de l'Etang de Berre, les technopôles dans le pays d'Aix, l'activité artisanale traditionnelle dans le pays d'Aubagne et les grands services et équipements publics à Marseille (hôpitaux, Dôme, Stade vélodrome, opéra...).

A celà s'ajoute une gouvernance démocratique atomisée autour de 6 EPCI auxquels s'additionnent de terribles rivalités entre caciques locaux et un manque flagrants d'infrastructures de transports collectifs pour lutter contre l'asphyxie du trafic automobile.Il faut qu’enfin les maires des principales agglomérations de l’aire métropolitaine apprennent à dialoguer dans un esprit d’intérêt général et non de défense électoraliste de petits intérêts particuliers et des marchandages permanents.

Le changement d'échelle dans la gestion des politiques publiques est crucial pour un développement soutenable et équilibré du territoire, pour la mutualisation des moyens et l'amélioration des services publics locaux. Il faut aussi changer la gouvernance locale en luttant farouchement pour la moralisation de la vie politique locale : en donnant plus de moyens au nouveau conseil de développement qui devra voir le jour pour favoriser un dialogue constructif de la société civile sur l'aire métropolitaine ; en imposant la critérisation et la co-élaboration des politiques publiques pour éviter l'arrosage clientéliste et donner du sens à l'intervention publique ; en faisant le ménage dans les emplois publics pour en finir avec les recrutements de complaisance et la précarisation des agents…

Cependant, le territoire possède de nombreux atouts. Au centre de l’arc latin et au débouché du Rhône, l'aire métropolitaine d'Aix-Marseille dispose d’un pôle universitaire et de recherche important, de grandes réserves foncières qu'il faudra  mobiliser, d'un tissu associatif très dense ; elle vient de voir se créer le premier parc national périurbain d’Europe avec le parc des Calanques ; elle est aujourd'hui Capitale européenne de la culture et vient d'inaugurer des grands équipements culturels et des nouveaux espaces publics emblématiques...

Le débat sur la métropolisation est aujourd'hui dominé par deux visions antagonistes:

  • celle, d'obédience libérale, des décideurs économiques fondée sur la mise en concurrence des territoires, la quête de compétitivité, le Graal du “ top 20 ”, l'ode à la croissance et les économies d'échelle 
  • et celle des “ barons locaux ” qui défendent dans une logique corporatiste étriquée la sauvegarde de leurs petits intérêts locaux avec des arguments parfois à la lisière du repli identitaire rance.

Une autre vision s'impose : la défense d'une éco-métropole, espace territorial adéquat pour mener à bien la transition écologique sur l'un des territoires les plus pollué d'Europe et des plus en déclin économiquement. La gouvernance métropolitaine peut permettre : d'entamer la reconversion de son tissu industriel en pôles d'innovation basés sur les nouvelles filières vertes liées aux centres de recherches universitaires (ex. création d'un pôle de chimie verte sur l'Etang de Berre pour anticiper l'après pétrole) ; de construire plus de logements adaptés à tous les Marseillais, de soutenir une économie innovante socialement et économiquement tout en valorisant les savoir-faire traditionnels et la relocalisation de la production (à l'exemple du projet de reprise collective des Fralib –thé et infusions l'Eléphant– en coopérative) et les circuits courts liant directement producteurs et consommateurs (Amap, épiceries solidaires...) en maintenant des terres agricoles ; de repenser l'activité portuaire vers des filières commerciales Nord Sud dans des démarches de commerce équitable ; de développer les filières d'énergies renouvelables et de rénovation thermique sur l'aire métropolitaine en s'appuyant sur une Agence locale de l'Energie métropolitaine ; de maîtriser le foncier en rendant opposables des outils de prospective permettant de maintenir des terres fertiles et cultivées, de limiter l'urbanisation en tâche d'huile et le mitage du territoire ; de développer les transports collectifs sur l'aire métropolitaine en saturation automobile avec la création de un réseau RER performant ; de rationnaliser les équipements collectifs en permettant à tous les citoyens de la métropole d'avoir accès à des équipements sportifs et culturels près de chez eux ; de travailler sur l'ancrage méditerranéen du territoire en valorisant la richesse populaire et multiculturelle du territoire ; en instaurant un dialogue coopératif entre les 2 rives renouant avec l'esprit de la Convention de Barcelone ; en luttant contre les discriminations, les politiques ségrégationnistes fracturant l'aire métropolitaine ; en permettant la création et l'essaimage culturel sur tout le périmètre métropolitain ; en développant l'éco-tourisme, le tourisme vert…; de penser l'éco-développement du territoire sur le tryptique : solidarité pour réduire les inégalités entre les citoyens et entre les territoires, coopération avec les territoires voisins et subsidiarité (conservation de la proximité du pouvoir dès que cela est possible).

La Métropole doit être une métropole d'usage et de projets devant améliorer le quotidien des habitants en terme de déplacements, d'accès à l'emploi, de qualité de vie...

Pour atteindre cet objectif, la question de la gouvernance est essentielle et c'est la loi qui répondra ou non à ces attentes.

L'élection au suffrage universel direct des conseillers métropolitains et ce dès 2014 sur une circonscription unique afin de voir naître un véritable espace public démocratique métropolitain est un impératif catégorique. En effet, aujourd'hui le débat est confisqué par les petits barons locaux soucieux de conserver leurs privilèges et par les experts au langage abscons.

Maintenir un mode d'élection indirect ou un fléchage avec un conseil des maires serait maintenir le système de gouvernance clientéliste actuel où l'échange de petits arrangements entre amis fait figure de politique publique et où la vision territoriale défendue n'est que l'addition d'intérêts particuliers locaux souvent à vocation purement électoraliste.

Le périmètre devant être arrêté par la loi doit être celui du département, échelon qui doit être supprimé au même titre que les EPCI existant. C'est la seule solution pour en finir avec le guérinisme qui tente de se refaire une virginité en prenant la tête de la fronde des “ anti-métropole ” avec en ligne de mire les sénatoriales et les futures cantonales. Le périmètre métropolitain doit donc être le périmètre départemental, bassin de vie des habitants (même si Arles et la Camargue est un territoire tiraillé entre Avignon, l'aire Montpellier / Nîmes et Aix/ Marseille). Les compétences (essentiellement sociales) du département seraient ventilées entre la Métropole et les communes.

Plutôt que le Conseil des Maires qui ressemble trop aux vieilles institutions de type 3e République, il faut créer un bicaméralisme métropolitain avec la mise en place à côté du conseil métropolitain, d'une Chambre de l'Avenir dans la philosophie de Dominique Bourg et de son “ Collège de l'avenir ” (pour remplacer le Sénat) pour éviter la tyrannie du court-terme et pour penser la mutation écologique et l'adaptation au changement climatique. Cette instance aurait un rôle crucial dans la co-élaboration des politiques publiques, leur évaluation, la création d'outils prospectifs adaptés au territoire... Cette assemblée serait composée de façon mixte d'experts (sociologues, économistes, climatologues, juristes...) et de citoyens tirés au sort sur les listes électorales. Ses membres seraient présents pour un mandat de 9 ans et auraient le droit d'initiative normative ou référendaire.

Aussi, il est crucial, après le vote de la loi nous donnant le cadre institutionnel de ce que sera l'Euro-Métropole, de mettre en place une méthode participative associant l'ensemble des acteurs locaux au travers d'ateliers citoyens métropolitains dont le but sera de définir collectivement le projet métropolitain en mobilisant l'intelligence collective pour la métamorphose d'un territoire jusqu'à maintenant balkanisé.

Défendre une éco-métropole comme espace de transition écologique et laboratoire d'un nouveau partenariat Nord Sud est un pari osé mais le statu quo dans l'atomisation d'un bassin de vie si riche et l'enlisement du territoire marseillais dans la crise et la gangrène du clientèlisme, de l'insécurité et de l'affairisme ne peut plus durer.

Messieurs les parlementaires, saisissez cette chance. Donnez du sens à la construction métropolitaine.

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