* Les recours s'accumulent * "On navigue à vue", déplore un cadre de la métropole * Un enjeu économique majeur par Jean-François Rosnoblet MARSEILLE, 10 février (Reuters) - Le Conseil constitutionnel examine jeudi les conditions de la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, une structure plébiscitée par les acteurs économiques locaux mais qui divise toujours autant au sein des partis politiques. "Nous vivons aujourd'hui un psychodrame politique, juridique et judiciaire pathétique", résume le président de la Chambre de commerce et d'industrie Marseille-Provence, Jacques Pfister. Projet phare du gouvernement, la métropole Aix-Marseille-Provence est devenue, le 1er janvier, la plus importante de France, regroupant six intercommunalités sur un territoire de plus de 3.000 km2 et 1,8 million d'habitants. Mais son fonctionnement se trouve grandement paralysé par les recours judiciaires des détracteurs d'une structure présidée par Jean-Claude Gaudin, le maire (Les Républicains) de Marseille, dont l'élection mouvementée mi-décembre a été annulée début janvier par le tribunal administratif de la ville. Ce dernier, qui peut finalement exercer la présidence de la métropole au prix d'un appel suspensif devant le Conseil d'Etat, ne dispose que de pouvoirs limités. "On navigue à vue dans une zone de conflit. Le plus grave, c'est que les rouages administratifs sont grippés. On ne peut passer de marchés publics par crainte de les voir annulés dans un futur proche", témoigne un cadre de la nouvelle institution. "Seule la décision à venir du Conseil constitutionnel sur la représentativité du conseil métropolitain permettra d'engager le fonctionnement institutionnel normal et complet de la métropole", reconnaît Jean-Claude Gaudin. DIVISION INTERNATIONALE L'instance examine jeudi une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à une disposition législative fixant les règles de composition du conseil de la métropole. Sa décision devrait être connue avant la fin du mois de février, précise-t-on de source proche du dossier. Le Conseil d'Etat avait pour sa part suspendu, à la mi-décembre, deux arrêtés fixant le nombre et la répartition des sièges de la métropole, décision qui aurait dû logiquement empêcher l'entrée en fonction de l'entité au 1er janvier. Ces aléas juridiques n'ont pas fait reculer le gouvernement qui, à travers le préfet des Bouches-du-Rhône Stéphane Bouillon, a confirmé la création de la métropole. "La question est de savoir, sur un territoire féru de foot, si nous voulons jouer en deuxième division ou en division internationale. Ce n'est pas seulement une question de prestige, mais une question de survie", a justifié le haut fonctionnaire. L'Etat estime en effet que la métropole doit être un "accélérateur et non un frein" au développement de la région, une vision qu'il partage avec les acteurs économiques locaux. "C'est un moment charnière pour le territoire. Cela suffit, il faut changer de méthode, de vision, de générations", dit le président de l'Union des entreprises des Bouches-du-Rhône (UPE13), Johan Bencivenga. "Aujourd'hui, on est dans des querelles de clocher. On a une même ambition, mais on ne parle pas la même langue. On ne se comprend pas". JEDI CONTRE IMMOBILISTES Accueillie avec bienveillance par les grands élus du territoire, la métropole est contestée par une grande partie des 92 communes qui la composent, peu enclines à partager leurs ressources fiscales et certaines compétences comme le logement ou le transport avec le parent pauvre marseillais. "Le besoin économique doit s'imposer à des élus qui restent scotchés à leurs territoires et à leurs électeurs", souligne Jacques Pfister. "Le train est passé, on est dedans, il faut en prendre les commandes." L'enjeu est de taille pour une métropole qui regroupe 37% de la population de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et fait face à un chômage élevé, notamment chez les jeunes, et à des poches de pauvreté parmi les plus importantes. Dans le classement des "Villes d'aujourd'hui, métropoles de demain", une étude publiée à la mi-décembre par le cabinet PwC (PricewaterhouseCoopers), Marseille ne figure qu'en 13e position d'une liste de 15 villes, Aix-en-Provence en 10e place, loin derrière Lyon, Paris et Bordeaux. "Marseille n'est pas le monde. L'image de la ville s'est améliorée, mais il reste beaucoup de travail à accomplir pour attirer davantage d'entreprises internationales", note Rodolphe Saadé, le vice-président directeur général délégué du groupe CMA CGM, troisième groupe mondial du transport maritime dont le siège social est domicilié dans la cité phocéenne. (Edité par Sophie Louet)
11 février 2016
Naissance laborieuse de la métropole d'Aix-Marseille-Provence
Naissance laborieuse de la métropole d'Aix-Marseille-Provence
Reuters le 10/02/2016 à 15:54
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